Insight | Perspectives d’adaptation au climat dans le 6e rapport du GIEC

Insight | Perspectives d’adaptation au climat dans le 6e rapport du GIEC
Posté par :
Célia Chamillard Célia Chamillard

Pour la dernière fois avant 2030, le GIEC a publié lundi dernier un rapport sur notre capacité d’adaptation au changement climatique. Le message principal a été validé par les 270 scientifiques et 195 gouvernements ligne à ligne : un développement résilient au changement climatique nécessite « de réduire les inégalités sociales » et « la protection de la biodiversité ». Si le premier volet du 6e rapport du GIEC, en aout dernier, affirmait qu’atténuer le changement climatique nécessite une réduction des émissions de GES anthropiques, ce second volet affirme avec autant de force que s’adapter nécessite la protection des populations et écosystèmes les plus fragiles.

Le rapport suit ce raisonnement : les impacts du changement climatique sont omniprésents et en partie irréversibles passé 1,5°. De plus, l’exposition des populations et écosystèmes à ces risques est inégale et leur vulnérabilité encore d’avantage inégalement répartie. Par conséquent, un développement résilient au changement climatique (i.e. qui minimise son impact total) nécessite une réduction des inégalités et une protection de la biodiversité.

Des impacts omniprésents et en partie irréversibles passé 1,5°

Aujourd’hui, le changement climatique menace les populations humaines et les écosystèmes.

La moitié de la population mondiale fait face à des périodes de pénuries d’eau chaque année dû au changement climatique ; les déplacements de faune multiplient l’incidence de zoonoses (maladies transmises des animaux à l’homme), non sans rappeler un virus-dont-on-ne-prononcera-pas-le-nom ; le GIEC note l’extinction locale de centaines d’espèces et l’extinction totale de plusieurs espèces inéquivocablement dues au changement climatique.

Ces impacts observés augmenteront avec le réchauffement de manière exponentielle et seront en partie irréversible passé 1,5°

Pour prendre l’exemple des migrations, le scénario RCP2.6 prévoit jusqu’à 40 millions de migrants climatiques en 2050 en d’Afrique sub-saharienne, quand le RCP8.5 en prévoit 85 millions. Plus le réchauffement s’intensifie, plus ces migrations seront intercontinentales : le HCR (Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés) en prévoit 250 millions au niveau global en 2050. Les impacts sur les écosystèmes croissent de la même manière : 48% des espèces feront face à un haut risque d’extinction en 2050 avec un réchauffement de 4,5°, quand elles ne sont « que » 14% à 1,5°. Ces extinctions, spécifiquement dans les écosystèmes polaires, de haute altitudes et côtiers (ex. récif de corail, forêts de varech), aux côtés de l’expansion des systèmes arides ou la perte des communautés vivant dans le cercle polaire (ex. les Sami), seront irréversibles.

…qui touchent disproportionnellement les populations et espèces fragiles

Une exposition et vulnérabilité aux impacts inégalement répartis…

Ces inégalités d’expositions se notent autant au niveau humain qu’écosystémique (les risques de sécheresses étant significativement plus importants en Amérique du Sud et Afrique qu’en Europe par exemple). Accentuant ces inégalités, les populations les plus exposées sont aussi les plus vulnérables. Cette vulnérabilité internationale et infra-nationale des populations est encore d’avantage inégalement répartie que l’exposition ; quand 3,3 milliards d’être humains vivent dans des contextes à haute vulnérabilité aux risques climatiques, la quasi-entièreté des pays du Nord ont des niveaux de vulnérabilités « faibles à très faibles ».

… non compensées par des mesures existantes mais court-termistes

Les mesures d’adaptations déjà mises en place sont sectorielles, fragmentées et priorisent la réduction immédiate du risque. Elles concernent essentiellement les risques et impacts liés à l’eau (système d’alerte anticipée de pénurie, de rétention d’eau afin d’éviter les risques d’inondation, digues, etc.), et perdent en efficacité avec l’intensité du réchauffement. Le GIEC déplore que ces mesures de court terme créent un risque de verrouillage des actifs adaptés et puissent réduire la résilience des écosystèmes (ex. systèmes d’extinctions d’incendies dans des écosystèmes naturellement adaptés aux feux). En somme, ces adaptations « pansements » donnent l’impression trompeuse d’une réponse efficace, voilant le besoin de réponse systémique au défi de l’adaptation.

Ergo, l’adaptation au réchauffement climatique nécessite la réduction des inégalités & la protection de la biodiversité

Ces inégalités d’exposition au risque requièrent de réduire les inégalités sociales

Les inégalités multidimensionnelles d’exposition au risque climatique (géographiques, socio-économiques, de niveau d’adaptation) ont une conséquence claire pour le GIEC : les mesures d’adaptation les plus efficaces sont celles qui réduisent les inégalités et protègent la biodiversité.   Le panel encourage ainsi les mesures de développement gouvernementales, civiles et privées « du local au global » qui soient inclusives et visent à « réduire les inégalités de genre, d’ethnies, […] ou de revenus » ; un exemple typique est la mise en place de politiques publiques soutenant la disponibilité de nourriture dans la durée.

Les mesures de protection de la biodiversité contribuent à la réduction des inégalités et à un développement résilient

Prenant l’exemple de la protection de la vie marine, le GIEC montre que l’ensemble des sous-objectifs (ex. pêcheries de petite taille) de cet ODD (Objectif de Développement Durable) 14 contribue ou facilite la réalisation des autres ODD sociaux (ex. SDG 3 santé pour tous) et économiques (ex. ODD 8 travail décent pour tous). De même, la protection de la biodiversité permet de protéger les peuples indigènes : 80% de la biodiversité restante se trouve sur des territoires occupés par ces derniers (ex. en Amazonie, Papouasie, Australie, etc).  Ces mesures de développement résilient sont également facilitées par la collaboration à tous les niveaux (internationale, infra nationale avec la société civile, médias, entreprises, acteurs financiers) et peuvent être rurales ou urbaines. En zones rurales, le GIEC promeut des mesures d’adaptation multi-sectorielles, globales et profondes telles que la conservation et restauration d’écosystèmes forestiers et de tourbières, l’agroforesterie, l’agriculture urbaine ; en zones urbaines on mentionne notamment les solutions fondées sur la nature (SFN) (ex. végétalisation, limitation de la fragmentation des écosystèmes via des écoducs / haies, etc).

 

I Care détient expertise de conseil en évaluation des risques et opportunités liés au changement climatique au niveau corporate, public et des insitutions financiers. En savoir plus.

 

Pour aller plus loin :

 

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